Aujourd’hui une bonne partie des actifs de la France et du monde est en télétravail compte tenu des mesures de confinement instaurées dans la plupart des pays.
Si en période « classique » le télétravail peut être une solution visant à prévenir le burn-out, en période de confinement et en continu il peut mener au contraire à une vraie souffrance pour le salarié, souffrance pouvant l’entraîner jusqu’au burn-out.
L’Organisation Internationale du Travail a en effet constaté que le chevauchement entre la vie privée et la vie professionnelle entraînait des niveaux de stress plus élevés notamment avec des troubles du sommeil.
Il faut donc accroître sa vigilance en cette période de confinement et encadrer le télétravail notamment par le biais du droit à la déconnexion.
En effet la tentation peut être grande tant pour le salarié que pour l’employeur de travailler et être disponible en continu.
Une obligation de sécurité et de protection des salariés.
Le burn-out ou syndrome d’épuisement professionnel se traduit par plusieurs symptômes qui ne sont pas forcément propres au burn-out et qui sont mesurables et détectables par divers questionnaires comme ceux de Kasarec ou de Siegrist.
Si le burn-out ne se trouve pas dans la liste des maladies professionnelles de la Sécurité sociale, il peut être reconnu comme maladie professionnelle et ce conformément à l’article L461-1 du Code de la sécurité sociale qui permet un établissement de la maladie professionnelle au cas par cas.
L’article L4121-1 du Code du travail soumet l’employeur à l’obligation de garantir « la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »
L’employeur doit donc être vigilant aux alertes éventuelles de ses salariés, et pour prévenir et éviter de telles alertes certaines mesures sont à mettre en place, notamment en ce moment le droit à la déconnexion.
Tout d’abord, il est utile de rappeler que le salarié en télétravail a les mêmes droits que le salarié qui est dans les locaux de l’entreprise et notamment le droit au respect de sa vie privée.
L’employeur doit plus particulièrement attirer l’attention des salariés en télétravail sur les restrictions à l’usage d’équipements informatiques ou de communication électronique et des sanctions en cas de non-respect.
Qu’est-ce que le droit à la déconnexion ?
Il s’agit du droit du salarié de ne pas être joignable hors son temps de travail, ce droit a depuis longtemps été reconnu par la jurisprudence, s’agissant en effet du corollaire au droit au repos quotidien de l’article L3131-1 du Code du travail.
L’article 55 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 a introduit le droit à la déconnexion dans le Code du travail.
Le droit à la déconnexion a dû être négocié, à compter du 1er janvier 2017, dans le cadre de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail.
À défaut d’accord, l’employeur a dû élaborer une charte, après avis de l’instance représentative du personnel.
Comment le mettre en œuvre en pratique ?
Dans beaucoup d’entreprises, les mesures de télétravail ont été prises dans l’urgence, et il faut donc s’assurer que soit bien mis en place un réel droit à la déconnexion, et cela par plusieurs moyens :
Il est tout d’abord nécessaire de prévenir et sensibiliser les salariés en télétravail à l’existence et au nécessaire respect de ce droit à la déconnexion, cela peut par exemple être fait par un communiqué des ressources humaines ou des rappels sur l’intranet de l’entreprise.
Il faut créer un climat de travail qui rend les abus inutiles, et sensibiliser en particulier les managers afin qu’ils n’envoient pas de mails ou ne téléphonent pas le soir et le week-end à leurs équipes.
Les managers devront s’assurer que leurs équipes respectent bien réellement ce droit à la déconnexion.
L’employeur pourra mettre en place le type de mesures suivantes :
- rappeler à ses salariés que les technologies de l’information et de la communication doivent être utilisées pendant le temps de travail et qu’il ne doit pas y avoir de connexion en dehors du temps de travail,
- prévoir des réponses automatiques par mails lorsque le salarié est en congés ou week-end avec les personnes à contacter en son absence ou invitant l’expéditeur à réitérer sa demande au retour de la personne,
- instaurer des alertes « pop-up » en cas de détection d’une sur-connexion ;
- mettre en place de « temps blancs » sans connexion informatique durant les heures de travail ;
- mettre en veille les serveurs hors des heures de travail, voire en bloquer l’accès,
- ajouter un encart sous la signature électronique des mails indiquant que ce mail sera traité durant le temps de travail.
Il s’agit bien évidemment d’une liste non exhaustive et il est également possible de mettre en place des interdictions assorties de sanctions.
A l’heure du déconfinement et avec le développement plus que probable du télétravail, il sera nécessaire pour les entreprises d’être particulièrement vigilantes au respect de ce droit à la déconnexion afin d’éviter la multiplication de burn-out et de contentieux pouvant en résulter.
Auteur
Agathe DAVID
Avocate au Barreau de Paris
https://www.siksous-friedmann.com
Article publié en premier sur Village-Justice et publié ici avec le consentement des auteurs.