Article de Bernard COHEN-HADAD, président de la CPME Paris Île-de-France, sur le travail le dimanche, paru le 8 novembre 2016 sur www.LesEchos.fr.
Commerces à Paris : ouvrir ou ne pas ouvrir le dimanche ?
Anne Hidalgo, la Maire de Paris, veut donner aux PME la liberté d’ouvrir 12 dimanches à Paris. Cette évolution limitée est une bonne chose, mais elle doit s’accompagner aussi d’une nouvelle relation aux PME de la ville de Paris.
Le débat sur la situation des TPE et PME parisienne et l’ouverture des commerces à Paris le dimanche méritent autre chose que des postures. Depuis 2015, les petites entreprises tous secteurs confondus qui sont présentes en boutiques dans la plupart des rues de Paris, et dans tous nos quartiers, souffrent directement ou indirectement des attentats, d’une raréfaction de la clientèle, de la concurrence accrue des grandes enseignes qui vendent à bas prix et du dumping de la vente à distance via l’Internet qui est fiscalement délocalisé.
Aujourd’hui, l’ouverture de “tous” les dimanches n’est pas sans conséquence sur la structuration financière des entreprises patrimoniales. Car le pouvoir d’achat des consommateurs n’est pas extensible. Les achats dominicaux se substituent aux achats en semaine.
Dans un contexte non régulé, seules les grandes enseignes ont les moyens de financer des aménagements en matière de salaire. Dans les TPE, l’ouverture dominicale, tout au long de l’année en dehors des zones touristiques, ne crée pas du chiffre d’affaires. Elle ne fait que déplacer l’achat vers une concurrence plus armée financièrement.
Ces derniers mois, une évolution législative a rendu possible l’augmentation du nombre de dimanches ouverts à Paris de 5 à 12 par an. Et de nouvelles zones touristiques internationales (ZTI) ont été établies. Et camper, maintenant, sur un refus de l’ouverture le dimanche est une erreur qui ne va pas dans le sens d’un soutien politique et économique aux TPE et PME.
Tous les week-ends ne sont pas les mêmes ! En effet, certaines fins de semaine sont de grande affluence ainsi que la rentrée scolaire, Noël, la fête des Mères, la Saint-Valentin, la fête des Pères… Et ne pas donner l’occasion aux commerçants d’ouvrir le dimanche, en fonction de leur activité, c’est privilégier les grandes enseignes et encourager les achats en ligne chez les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon).
Dans cet esprit, alors que les fêtes de fin d’année s’annoncent, et que nos TPE et PME ont besoin de renouer avec la confiance, un développement de leur chiffre d’affaires et une meilleure rentabilité, il est difficile de ne pas se féliciter que la Mairie de Paris soit attentive à mettre un peu d’équité dans un monde commercial qui l’est de moins en moins et qu’elle donne aux commerçants la liberté (et non pas l’obligation) d’ouvrir 12 dimanches par an à Paris. Et de leur laisser le choix, d’autant que les périodes d’affluences varient selon les secteurs d’activités.
Cette liberté qui est donnée aux commerçants parisiens répond aux attentes des petites enseignes notamment les chocolateries, jeux-jouets, informatiques, optique… qui ont un vrai savoir-faire, des personnels qualifiés, mettent en avant des produits made in France et sont soumises de plein fouet à une forte concurrence qui mise sur le prix et non pas la qualité ni la traçabilité. Mais étendre le nombre d’ouvertures dominicales annuelles, avoir le sentiment d’un devoir accompli, et en rester là ne suffit pas à aider le commerce parisien !
Il faut également répondre aux attentes des TPE, PME et des branches qui sont soucieuses de “l’ouverture” d’un grand débat sur la place des entreprises dans la ville Paris. Paris n’est pas une ville comme une autre et ce grand débat doit enfin avoir lieu et se fonder, sans a priori, sur une réflexion approfondie que nous devons mener tous ensemble et qui doit traiter de la participation des PME aux décisions qui les concernent, la simplification administrative, les relations des TPE et PME avec les bailleurs privés et sociaux et l’amélioration de la sécurité vis-à-vis des entreprises et de leurs personnels.
Donner la liberté aux commerces d’ouvrir le dimanche à Paris, faire montre d’écoute, mais donner aux PME le sentiment qu’elles existent, aussi, tout le reste de la semaine dans la Ville, c’est faire preuve de lucidité et de sagesse politique.
@bcohenhadad