Préfet de Police de Paris, Laurent Nuñez livre à la CPME Paris son regard sur les défis soulevés par la préparation des jeux et sur l’organisation collective nécessaire pour y faire face. La Préfecture de Police de Paris s’affirme aux côtés des entreprises de proximité pour un été 2024 réussi, festif et sûr.
Vous êtes préfet de police et préfet de la zone de défense et de sécurité (zds) de Paris: pouvez-vous nous éclairer sur les différences entre ces deux rôles et sur la complémentarité des missions ?
Hors contexte spécifique lié aux Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), le Préfet de Police dispose de compétences et de prérogatives à l’échelle de l’agglomération parisienne (Paris et petite couronne), où il est responsable de l’ordre et de la sécurité publics. A l’échelle régionale, donc pour toute l’Île-de-France, il est compétent pour la sécurité dans les transports en commun et sur les grands axes routiers structurants. Il est chargé de la coordination pour toute la région IDF des politiques de sécurité et exerce des compétences propres dans les domaines de la sécurité civile, de la sécurité économique et de la gestion de crise en cas d’événement dont l’ampleur dépasse un département.
Durant l’été 2024, les exigences en termes de niveau de sécurité, de cohérence des dispositifs et de commandement lisible et efficace nécessitent une approche différente. En effet, le Préfet de Police verra les compétences qu’il exerce sur l’agglomération parisienne étendues à toute l’Île-de-France et ce, pour des questions de sécurité liées aux JOP. Bien évidemment, le dispositif de commandement durant la période des Jeux olympiques et paralympiques s’appuiera sur les acteurs locaux, notamment les préfets de département à qui il pourra déléguer certaines de ses compétences élargies. Pour autant, il est essentiel qu’une seule autorité dispose de tous les leviers d’action et de l’ensemble des moyens mobilisés.
QUELLES SONT VOS ACTIONS EN LIEN AVEC LA PRÉPARATION DES JOP2024 ? QUELS SONT LES PRINCIPAUX CHANTIERS ET RISQUES IDENTIFIÉS ?
Quelles sont vos actions en lien avec la préparation des JOP 2024 ? quels sont les principaux chantiers et risques identifiés ?
La préparation des JOP implique la pleine mobilisation de tous les acteurs sans exception : Paris 2024, organisateur des Jeux, avec qui les relations et travaux sont quotidiens, Les services de l’Etat concernés tels que la délégation interministérielle des JOP, la coordination nationale à la sécurité des Jeux du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, la préfecture de la région IDF et les préfectures de départements, etc., Les collectivités territoriales, au premier rang desquelles la Ville de Paris et la Ville de Saint-Denis, mais également les autres communes concernées, la Métropole du grand Paris et le Conseil régional, Les opérateurs tels qu’Haropa Ports de Paris, Île-deFrance Mobilités, les opérateurs de transports collectifs, les gestionnaires de voirie, Les associations agréées de sécurité civile…
La menace terroriste, au regard de la situation nationale et internationale, demeure bien sûr la menace principale mais la lutte contre la délinquance, la gestion d’un public nombreux notamment pour les grands évènements, dont la cérémonie d’ouverture, demeurent également prioritaires. Les forces de sécurité intérieure, les militaires, les forces spécialisées, les démineurs, et bien d’autres forces venues de tout le territoire intégreront des dispositifs qui pourront répondre efficacement et rapidement à toutes les hypothèses de menaces ou de faits délictueux. Autant de risques sur lesquels nous travaillons et qui font l’objet de multiples exercices d’entraînement, lesquels concernent également les problématiques de circulation ou liées aux phénomènes climatiques… Comme pour tout grand événement, il nous faut collectivement nous préparer à répondre à tous les types de situations qu’elles aient une origine accidentelle ou malveillante
Comment vous assurer que les JOP restent un moment de fête et de joie à Paris et pour le monde entier ?
Sous l’autorité du ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer, les plans zéro délinquance sont déployés depuis plusieurs mois sur l’ensemble des territoires concernés par les JOP. Il s’agit de lutter contre la délinquance en déployant massivement des effectifs de forces de sécurité intérieure. Ces actions sont quotidiennes mais constitueront un héritage des JOP : la délinquance baisse et continuera à baisser après les JOP. Ce volet de la délinquance du quotidien est essentiel. Chaque site olympique et festif fera l’objet d’un dispositif de sécurité adapté au volume de public accueilli en prévoyant la pose de dispositifs de sécurisation (barrières, plots béton…), ainsi que la mobilisation de tous les acteurs de sécurité en premier lieu les forces de sécurité intérieure mais aussi les militaires, les polices municipales et les agents de sécurité privée. Il faut aussi rappeler le travail en amont de services du renseignement qui, en lien avec leurs homologues internationaux, agissent au quotidien envers ceux qui pourraient nourrir des intentions malveillantes envers notre pays.
Quelles attentes avez-vous quant à la consultation ouverte depuis mi-décembre après la présentation des périmètres ?
Le dossier porté par la France pour les JOP 2024 se distingue par des engagements forts en matière de maîtrise budgétaire et d’écologie. Mais l’originalité de ces Jeux tient également aux deux cérémonies d’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques qui ne seront pas organisées dans un stade mais en ville, pour permettre au plus grand monde d’y assister. Ce sont des sites olympiques en ville ou s’appuyant sur des sites existants qui seront activés sur les départements de Paris, du 77, du 78, du 92 et du 93 et enfin des épreuves sur route. De fait, les JOP « en ville » généreront des contraintes de déplacement en particulier pour les véhicules motorisés, aux abords immédiats des sites ou des épreuves sur route. Hors les sites olympiques et leurs abords immédiats, la circulation ne sera aucunement impactée.
La durée des Jeux et le nombre de sites concomitamment activés ne peuvent permettre de « faire comme d’habitude ». Aussi, cette information très en amont permet à chacun de disposer de tous les éléments utiles pour pouvoir anticiper les organisations et le fonctionnement de chaque activité. Au terme de la phase de consultation à la mi-janvier, la Préfecture de Police pourra, avec l’organisateur et ses services, adapter si besoin les dispositifs. À titre d’illustration, des dérogations d’accès en véhicule motorisé à certains périmètres doivent s’envisager pour réduire les contraintes pour les particuliers et les professionnels, c’est une évidence. Cependant, ces dérogations doivent être assorties de conditions strictes de contrôle en amont pour tenir les exigences élevées de sécurité, inhérentes à un tel événement mondial.
Comment les entreprises installées à proximité des périmètres seront-elles accompagnées pour faire face aux problématiques de sécurité ?
Vers qui les entreprises peuvent-elles se retourner pour anticiper les questions ?
Les consultations à Paris sont menées personnellement par le Préfet de Police en présence des représentants des collectivités et de Paris 2024. Elles sont relayées selon les mêmes principes dans chaque département d’Île-deFrance sous l’égide des Préfets de département. Concernant Paris, l’ensemble des informations et des cartographies, mais également une foire aux questions (FAQ) sont accessibles à tous depuis les sites internet de la préfecture de Police, de Paris 2024 et de la Ville de Paris. La FAQ offre également la possibilité d’envoyer une demande de renseignement. Les principes régissant le fonctionnement des périmètres seront arrêtés à l’issue de la période de consultation, soit fin janvier 2024. L’ensemble des documents d’information déjà mis en ligne seront adaptés pour tenir compte des observations pertinentes formulées pendant les échanges.
Le temps restant d’ici là est dédié à surmonter les situations identifiées et à adapter les organisations de chacun. Mais, il faut être conscients que cette période exceptionnelle des JOP ne sera pas celle de tous les jours, même si tout est fait pour en réduire les impacts. La programmation des livraisons, le recours au télétravail… sont des réflexions que chaque entreprise ou activité libérale devra intégrer et analyser pour permettre la poursuite de son activité. L’État tient à ce que les commerces et entreprises puissent fonctionner durant toute la durée des Jeux et il nous faut dès lors travailler ensemble à la méthode (programmer les livraisons en dehors des flux de spectateurs venant assister aux compétitions, permettre les déplacements des salariés et des clients dans certaines conditions…).
Vous anticipez la gestion du risque terroriste. Quid des actions de cybersécurité ou de cyberdéfense dédiées à la préparation des jeux ?
Ce risque constitue une menace nouvelle qui fait l’objet de travaux sous l’égide de l’ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information). Les réseaux les plus sensibles durant la période des Jeux olympiques et paralympiques font l’objet d’audits afin d’apporter les protections utiles. Dans ce domaine comme tout autre sujet, le risque zéro n’existe pas. Nous y travaillons au quotidien avec, vous le comprendrez, une grande et nécessaire discrétion.
Quels conseils donner aux chefs d’entreprises pour les aider à anticiper l’impact des JOP dans les TPE-PME ?
Les échanges riches des dernières semaines ont mis en évidence la volonté collective d’offrir les meilleures conditions pour des Jeux olympiques et paralympiques populaires. La Préfecture de Police a pu constater la diversité des contraintes propres à chaque activité, du personnel médical libéral à la société de livraison, de la supérette aux restaurateurs, pour accéder en véhicule motorisé aux périmètres de circulation interdite…. Des aménagements importants à ce principe d’interdiction générale – qui je le rappelle ne concerne ni les vélos ni les piétons – ont été prévus et seront accrus à l’issue des consultations. Pour autant, chacun devra adapter son organisation du quotidien durant les JOP, avec l’accompagnement des services de l’État, de l’organisateur et des collectivités. Voilà un siècle que la France n’avait pas accueilli les JOP d’été et nous pouvons collectivement trouver les moyens de démontrer la capacité d’adaptation de nos entreprises françaises.