L’instant réglementaire : quand le Parlement européen vote, le Parlement français contrôle

28 Mai 2024 | Actualités, Europe

Le Parlement européen n’est certainement pas l’institution politique la plus placée sous les projecteurs. Pourtant, les députés ont adopté de nombreux textes, dont certains auront un impact très concret sur la vie des Européens.

C’est le cas de nombreuses mesures du Pacte vert, qui vise la neutralité carbone pour 2050 et qui entend réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55 % d’ici à 2030 ou du Pacte Asile et Immigration, deux volets dictant l’agenda de la campagne.

Et le Parlement français dans tout ça ?

L’adoption de ces législations européennes passe par des négociations entre les 27 États membres, généralement au niveau des ministres : en ces domaines, le Parlement délègue donc au Gouvernement sa mission de législateur. C’est pourquoi la Constitution française prévoit que le Sénat et l’Assemblée nationale soient saisis de tous ces projets de textes européens pour pouvoir les examiner et indiquer, avant que leur négociation soit conclue, s’ils jugent ces projets dans l’intérêt des citoyens français.

Deux outils permettent au Parlement de faire valoir les priorités des Français qu’il représente sur le sujet : les résolutions européennes, qui sont adressées au Gouvernement, et les avis politiques, qui s’adressent à la Commission européenne. En 2021-2022, le Sénat a ainsi adopté 17 résolutions européennes, par exemple pour obtenir des règles européennes claires contre les violences faites aux femmes, l’Assemblée, 19, pour soutenir les objectifs européens de lutte contre le réchauffement climatique tout en demandant le respect des choix énergétiques de la France et des mesures d’accompagnement social, ou pour mieux encadrer les acteurs du numérique. 64 % ont été majoritairement reprises dans les législations européennes finalement adoptées, qui vont s’appliquer à tous les citoyens.

La France a accepté de partager un certain nombre de compétences avec 26 autres États dans le cadre de l’Union européenne. Cette dernière, sur proposition de la Commission européenne présidée par Ursula von der Leyen, peut donc adopter des « lois européennes » (appelées règlements ou directives) qui s’appliquent dans toute l’Union européenne, y compris en France et dont le nombre va croissant.

La commission des affaires européennes de l’Assemblée et celle du Sénat ont ainsi dressé un bilan annuel de leur contrôle sur l’action européenne du Gouvernement et sur les politiques européennes

Au cours de la période 2021/2022, elles ont été saisies de 949 projets de textes européens et en ont sélectionné 261, sur lesquels elles ont mené un examen plus approfondi jusqu’à proposer à l’Assemblée et au Sénat l’adoption d’une position politique (résolution ou avis). Elles ont ainsi adopté 21 résolutions européennes, 19 avis politiques et 7 avis motivés en 2021-22.

Le Parlement peut aussi adopter des avis motivés, adressés à la Commission européenne, quand il considère que l’Union européenne va trop loin et ne respecte pas les compétences de la France. En 2021-2022, le Sénat a émis 4 avis motivés, en particulier pour assurer l’autonomie alimentaire des Européens en modifiant la politique agricole, l’Assemblée nationale 6, notamment sur la filière nucléaire.

Quelques exemples de positions prises du Parlement français et leurs suites :

Demande de mise en place de règles européennes claires pour lutter contre les violences faites aux femmes et prévoir des sanctions pénales : le Sénat a adopté à cet effet une résolution européenne n° 46 du 26 novembre 2021.

Le 8 février 2022, la Commission européenne a présenté une proposition de directive qui répond à cet objectif  ; Instauration de mesures de détection et de signalement des contenus illicites en ligne, de régulation des publicités ciblées et de contrôle des grandes plateformes, dans la législation européenne sur les services numériques (DSA), conformément aux recommandations de la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale 

Mise en garde à la Commission européenne sur la nécessité de ne pas mettre en danger la filière professionnelle des huiles essentielles de lavande et les métiers du patrimoine travaillant le plomb (vitraillistes ; facteurs d’orgues ; couvreurs…) lors de la révision en cours des règles européennes sur les produits chimiques, par deux résolutions européennes de l’Assemblée nationale (résolutions européennes n° 128 du 5 juillet 2022 et n° 150 du 26 août 2022), jouant ainsi un rôle de « lanceur d’alerte » 

Souhait d’un changement des priorités de la politique agricole commune (PAC) pour augmenter la production agricole à la suite de la guerre en Ukraine, afin d’assurer l’autonomie alimentaire de l’Europe, exprimée par le Sénat dans son avis motivé n° 31 en date du 8 novembre 2021 ; refus de la Commission européenne d’accepter ce changement au nom du respect des objectifs climatiques du « pacte vert pour l’Europe ».

Cet article a été rédigé par :

Ronan Le Goaziou

Président – Voxa

Spécialisé en affaires publiques, avec un parcours professionnel de plusieurs années au sein de l’équipe d’Emmanuel Macron alors candidat, au Parlement et au Ministère du Travail, Ronan Le Goaziou a fondé VOXA, un cabinet de conseil en affaires publiques. Consulté par diverses organisations engagées telles que des entreprises, des associations et des fondations, Ronan met son expertise au service de leurs ambitions et de leurs projets.

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