Position CPME | Projet de loi d’Orientation des Mobilités

21 Fév 2019 | Actualités, Mobilités, Transition énergétique

Commentaires Généraux

La question de la mobilité intéresse tout particulièrement les chefs d’entreprise notamment de TPE-PME. Ainsi lors des Assisses de la mobilité puis dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi, des échanges réguliers se sont tenus entre la CPME et ses adhérentes, acteurs du secteur de la mobilité, et le ministère des transports et ses services.

Ces travaux ont notamment permis d’introduire dans le texte la nécessité de mettre à disposition des collectivités territoriales, des entreprises et des usagers des outils efficaces de modernisation des moyens de transports qu’ils soient individuels ou collectifs, de marchandises ou de voyageurs.

Notre Confédération représente 200 fédérations et syndicats de métiers avec des préoccupation très diverses : développement d’une activité de transports, amélioration de l’attractivité des territoires, modernisation des réseaux de transports… C’est pourquoi, la CPME souhaite que la réflexion autour de la mobilité soit prise comme un tout qui n’oppose pas les modes de transport ou les énergies utilisés.

Il est indispensable de considérer la mobilité comme facteur de croissance économique. C’est un message récurrent de la CPME qui souhaite s’assurer que le projet de loi d’orientation des mobilités ne stigmatise pas certaines solutions plutôt que d’autres. Il est nécessaire de développer et de soutenir les multiples solutions techniques, qu’elles soient sur le marché, en cours d’industrialisation ou en gestation dans les services R&D des entreprises françaises. C’est une exigence pour ne pas enfermer les usagers et les entreprises dans une solution unique qui ne permette pas de s’adapter aux besoins de chaque usage. L’exemple le plus illustrant étant le traitement de la question du véhicule électrique qui ne laisse pas suffisamment la place aux technologies alternatives ou complémentaires (GNV, hydrogène…).

Le projet de loi participe pleinement à l’utilisation des meilleures technologies disponibles et favorise le développement des innovations des entreprises françaises avec comme objectif de les exporter en Europe et dans le monde. Néanmoins, l’évolution technologique et l’ubérisation de l’économie ne doivent pas continuer à déréguler le secteur des transports. Les mesures du projet de loi restent, sur ce point, très insuffisantes, c’est pourquoi la Confédération souhaite garantir aux différents acteurs du transport une concurrence loyale : accès aux données des véhicules, ouverture des données pour constituer un service multimodal…

Enfin, la question de la programmation et du financement des investissements dans les transports inquiète la Confédération. Le contrôle des flux de recettes et de dépenses est indispensable à l’acceptabilité de la fiscalité liée aux transports et aux énergies. De ce point de vue, le projet de loi ne va pas assez loin et il devrait se voir attacher, en parallèle, une loi de programmation des investissements et du financement ne réduisant pas cette question à un simple article et une annexe. Ce sujet d’importance mérite une place et un débat parlementaire spécifique permettant de mettre en œuvre une véritable stratégie pluriannuelle d’investissement de l’Etat partagée avec les collectivités territoriales et les entreprises.

Positionnement

Titre I. Améliorer la gouvernance des mobilités pour mieux répondre aux besoins quotidiens des citoyens, des territoires et des entreprises

Article 1

L’organisation plus efficace des mobilités dans chaque territoire (Chapitre Ier) est au cœur du projet de loi et répond efficacement au besoin de coordination des actions territoriales à un niveau pertinent qu’est la région. Cependant, certaines questions restent en suspens, comme la possibilité pour une région d’exercer la compétence d’Autorité Organisatrice de la Mobilité (AOM) lorsque des communes n’auront pas transféré leur compétence à la communauté de communes compétente.

Ce transfert de compétence n’étant pas assorti de la possibilité pour la région de lever le versement mobilité, se pose donc la question du financement des politiques de transport. Ce cas de figure se doit d’être exceptionnel mais pour la CPME il faut l’anticiper pour éviter la recherche de financement dans l’urgence.

Article 2

La principale conséquence d’une mise en place d’AOM sur l’ensemble du territoire est la création d’un versement mobilité en remplacement du versement transport. Le projet de loi permet de lever cette contribution locale sur l’ensemble du territoire alors même que le versement transport était limité aux communes de plus de 10 000 habitants. La CPME demande la suppression de cette nouvelle fiscalité et renouvelle son souhait de voir un rééquilibrage réel du financement des transports publics, c’est-à-dire faire porter une part plus importante par les usagers et donc réduire le montant du versement transport des entreprises.

Article 4

Concomitamment, le projet de loi prévoit la création d’un Comité des partenaires. C’est le signe d’une volonté de dialogue avec les financeurs et les usagers qui composeront ce comité. Il devra être le garant du dialogue avec les autorités compétentes et selon la CPME il devra répondre à deux caractéristiques majeures : inclure les entreprises de la mobilité (les AOM n’ayant pas le monopole de l’organisation des transports) et assurer la représentativité des acteurs présents dans ce comité. Ce point est crucial pour que le dialogue proposé puisse être sincère et prendre en compte l’ensemble des problématiques des employeurs et des apporteurs de solution qui ne se limitent donc pas aux AOM.

Article 5

Le chapitre II sur le renforcement de la coordination des autorités organisatrices de mobilité au service de l’intermodalité porte sur la planification de la mobilité en particulier l’élaboration de plan de mobilité (article 5). Cet outil doit permettre d’articuler au niveau local les flux de voyageurs et les transports disponibles.

Sur ce point la Confédération des PME regrette la suppression, par rapport au texte présenté au Conseil National de la Transition Ecologique, des schémas de desserte fluviale et ferroviaire qui permettaient d’identifier les quais utilisables pour les transports urbains de marchandises et de passagers par la voie d’eau, les zones et équipements d’accès au réseaux ferré, leurs principales destinations et fonctionnalités, l’articulation avec les équipements logistiques existants et futurs.

Dans la même logique, l’intégration de la question des plans de mobilités scolaires aurait permis d’avoir une vision globale sur ce type de transport et permettre la mutualisation les solutions entre les différents niveaux scolaires (collège, lycée et supérieur).

Article 6

Les dispositions concernant la mobilité solidaire (Chapitre III) demeurent un point prioritaire pour les TPE-PME. Il s’agit d’accompagner les personnes dites fragiles pour faciliter l’accès au travail et donc l’employabilité (article 6). La CPME propose d’ajouter les apprentis dans la liste des personnes à accompagner d’une part parce que les jeunes en apprentissage n’ont pas nécessairement l’âge d’avoir le permis de conduire et d’autre part parce que les déplacements s’organisent autour de deux destinations : le lieu d’étude et le lieu de travail. Le développement de l’apprentissage en France étant une prioritaire, il faut se donner les moyens de mettre en place cet accompagnement.

Article 8

Enfin, les mesures spécifiques aux outre-mer (chapitre IV – article 8) doivent prendre en compte l’absence de transports publics et donc l’interdiction de lever cette contribution locale (versement mobilité). Il serait également souhaitable de prendre en compte les spécificités énergétiques et ainsi de favoriser le développement du bioGNV et de l’hydrogène dans les départements de Guadeloupe et de La Réunion et dans les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

Titre II. Réussir la révolution numérique dans les mobilités

Article 11

L’accélération de l’ouverture des données et le développement des services numériques (chapitre II) répond à des besoins réels pour les usagers et les services de mobilité. Si le projet de loi pose les bases de l’utilisation des données aux nouveaux besoins des entreprises et des utilisateurs, les exigences en matière d’accès à l’information ou au respect de la libre-concurrence sont fondamentales. Ainsi la possibilité de constituer un service multimodal de vente de services de transport ou de stationnement (article 11) ne doit pas laisser la possibilité pour ces nouveaux acteurs d’offrir un classement des offres en fonction d’accords commerciaux avec certaines entreprises de transport. Autrement dit, le projet de loi n’encadre pas suffisamment le risque de dérive qui défavoriserait certains acteurs, la CPME réclame donc que les règles de libre concurrence soient clairement intégrées au projet de loi.

Article 13

Dans le même ordre d’idée, l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour assurer la création d’un cadre non discriminatoire d’accès à certaines données des véhicules pour le service privé (article 13) n’apparait pas suffisamment précise. En effet, les dispositions du projet de loi doivent préciser la notion de non-discrimination à l’accès aux informations. Enfin, il semble indispensable d’ajouter une disposition précisant que les données des véhicules restent la possession du propriétaire du véhicule.

Article 15

La volonté de réguler les nouvelles formes de mobilité et renforcer la responsabilité sociale des plateformes de mise en relation est une nécessité et la CPME soutient ces différentes dispositions. Concernant la possibilité pour les collectivités territoriales de prendre des mesures pour faciliter la circulation de certains véhicules notamment les véhicules transportant un nombre minimal d’occupants (article 15), la Confédération souhaite que ces mesures soient encadrées au niveau national pour qu’une continuité des pratiques territoriales puissent garantir une application homogène sur le territoire.

Titre III. Développer les mobilités propres et actives

Le développement des mobilités propres et actives doit être au cœur des solutions de transport lorsqu’elles sont possibles. En cela, la CPME soutient tout dispositif simplifiant dans les entreprises la mise en place d’aménagements favorisant ces déplacements à condition qu’ils restent volontaires.

Article 22

Le marquage des vélos est une solution qui devrait limiter les vols, et à tout le moins de faciliter la recherche des vélos volés ou perdus. La CPME alerte sur le fait qu’un marquage peut avoir un coût estimé entre 10 et 15 euros par produit. Les vendeurs pourront répercuter ce coût sur le prix final de vente à condition que celui-ci soit suffisamment élevé pour qu’une acceptation soit possible. En effet, un produit comme un vélo enfant qui coûte entre 50 et 60 € en moyenne verrait son prix atteindre 65 ou 75 €. C’est pourquoi la Confédération demande que ce marquage soit obligatoire pour les vélos de plus de 20 pouces pour ne pas représenter plus de 15% du prix de vente du produit.

Article 23

Le déploiement des Infrastructures de Recharge pour Véhicules Electriques (IRVE) doit être accompagné d’un cadre juridique adapté. L’article 23 tel que présenté correspond bien aux attentes des professionnels. En effet, il était essentiel à la bonne mise en œuvre des exigences liées aux infrastructures de recharges pour véhicule électrique d’avoir un décret d’application en Conseil d’État visant à fixer les caractéristiques minimales des dispositifs d’alimentation des installations de recharge pour véhicule. D’autre part, la disposition relative à l’activité de recharge répond de manière satisfaisante aux exigences des opérateurs qui s’approvisionnent en totalité auprès d’un fournisseur titulaire de l’autorisation d’exercer l’activité d’achat d’électricité pour revente. Le projet de loi doit conserver cette rédaction pour ne pas faire de l’activité de recharge une activité de revente d’électricité. Enfin, il apparaît important de préciser que le décompte individualisé des consommations dans les parkings de plus de 10 places en résidentiels soit rendu possible ultérieurement mais non installé dès le pré-équipement.

Article 26

Concernant le forfait mobilité durable présenté par le projet de loi, la CPME s’est exprimée en faveur de ce dispositif d’accompagnement des déplacements vélo ou covoiturage. Précisément le dispositif doit rester volontaire, défiscalisé jusqu’à 400€/an et non cumulable avec le remboursement des frais de carburant engagés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail et le remboursement du prix des titres d’abonnements souscrits par ses salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail accomplis au moyen de transports publics. La Confédération souligne le risque de complexité si le dispositif était adaptable chaque mois, la préconisation retenue serait un choix définitif chaque 1er janvier pour l’année en cours ou à l’arrivée d’un nouveau salarié.

Article 28

Enfin la mise en place des Zones à Faibles Emissions (ZFE) qui remplacent les zones à circulation restreinte doivent d’une part imposer une durée minimale des arrêtés des collectivités territoriales de 3 ans permettant une visibilité et une prévisibilité suffisantes pour les acteurs économiques. Et d’autre part, mettre en place des critères communs entre les différentes agglomérations pour ne pas autoriser des véhicules à un endroit et les interdire à un autre.

Titre IV. Programmation et financement des investissements dans les transports

Article 30

Le titre IV et son article unique organisent la programmation et le financement des investissements dans les transports pour les 5 prochaines années. Est annexé au projet de loi un rapport qui détermine les modalités de mise en œuvre de la stratégie d’investissement dans les transports. Il fixe les montants des dépenses de l’Agence de financement des infrastructures de transports de France au titre de la programmation des investissements de l’Etat dans les transports annuellement sur la période 2019- 2023 et précise les enjeux de programmation à l’horizon 2027.

La CPME prend acte de l’engagement du gouvernement de revoir les financements prioritaires en limitant les projets non financés. La Confédération souligne néanmoins que le financement se trouve amputé de 500 millions d’euros sans que les sources de revenu que le gouvernement souhaitait mobiliser soit présente dans le projet de loi de finances pour 2019. Il est donc nécessaire d’ajuster le niveau des dépenses et du financement par rapport aux dispositions prévues par le PLF 2019. Il ne serait pas acceptable qu’une augmentation de la fiscalité des entreprises vienne couvrir ce déficit. En second lieu, la Confédération souhaite qu’un projet de loi de programmation soit pris en lieu et place du rapport annexé. De cette façon, un débat parlementaire aurait pu ouvrir le dialogue sur les besoins prioritaires des usagers.

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